28 juillet 2010
Ailleurs
"L'obsession de l'ailleurs c'est l'impossibilité de l'instant ; et cette impossibilité est la nostalgie même."
Cioran, Précis de décomposition
Flambé (Iphiclides podalirius) sur une fleur de budléia

Cuivré de la verge d'or (Heodes virgaureae)

24 juin 2010
La bâtisse d'ombre
"Contemplatif est rigoureusement synonyme de "contemporain", non seulement parce que la contemplation, loin de dispenser de la condition contemporaine, y oblige avec une extrême délicatesse, mais parce que pour voir, pour bien y voir, il faut être du même âge, tout bas, que les êtres et les choses."
François Cassingena-Trévedy, Etincelles III, 2006-2009, Paris, Ad Solem, 2010
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"On a l'impression qu'au fond les hommes ne savent pas très exactement ce qu'ils font. Ils bâtissent avec des pierres et ils ne voient pas que chacun de leurs gestes pour poser la pierre dans le mortier est accompagné d'une ombre de geste qui pose une ombre de pierre dans une ombre de mortier. Et c'est la bâtisse d'ombre qui compte."
Jean Giono, Que Ma Joie demeure
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Voici une nouvelle série sur l'usine de la Grande Vapeur, à Oyonnax.
Rares sont les lieux qui livrent d'emblée leur secret. Mais rares aussi, de plus en plus rares, sont ceux qui ont encore un secret à livrer. La Grande Vapeur, à cet égard, n'est pas une usine comme les autres.
Cette fois, j'ai voulu transcrire les émotions chuchotées par les murs nus et les pièces désormais silencieuses. Chaque pièce a son histoire, et chaque mur se souvient; leur mémoire est moins oublieuse que celle des hommes, moins tapageuse aussi. Si l'on y prend garde, alors l'usine de la Grande Vapeur n'est plus seulement une ruine, ou un monument historique en attente d'une hypothétique réhabilitation, mais un lieu aux multiples intimités, riche de recoins, de détours, de facettes, qui semblent autant de secrets.
Cette usine - une fois n'est pas coutume - a une âme.
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Retrouvez tous les billets sur l'usine de la Grande Vapeur ICI.
16:17 Écrit par Nathan dans Architectures | Commentaires (2) | Tags : architecture, ville, citation, ain, giono, oyonnax, grande vapeur, francois cassingena | |
21 juin 2010
Ecartelée
"Rêver un impossible rêve
Porter le chagrin des départs
Brûler d'une possible fièvre
Partir où personne ne part..."
Jacques Brel, "La quête"
L'écartelée
19:46 Écrit par Nathan dans Abstractions | Commentaires (0) | Tags : citation, noir et blanc, macro, matiere | |
19 juin 2010
La grâce de l'inutile
"La vie est faite de l'inutile, à tel point qu'elle serait tout simplement insoutenable sans lui. Toute l'affaire est de discerner sans cesse et de choisir en conséquence de quelle inutilité l'on se soutiendra. Car il en est une qui est vraiment inutile, et une autre qui, ayant toutes les grâces, a principalement celle de ne l'être pas."
François Cassingena-Trévedy,
Etincelles III, 2006-2009, Paris, Ad Solem, 2010
Coquelicots en bordure d'un champ d'orge
07:00 Écrit par Nathan dans Flore | Commentaires (2) | Tags : citation, ain, flore, francois cassingena | |
16 juin 2010
Ensoleiller l'imagination
"Ensoleiller l'imagination de ceux qui bégaient au lieu de parler, qui rougissent à l'instant d'affirmer.
Ce sont de fermes partisans."
René Char, Feuillets d'Hypnos
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Féminité du bois
"On a planté jadis bien peu de jacinthes dans l'âme des enfants, semble-t-il, pour que les hommes mûrs d'aujourd'hui aient tant de peine à concevoir que Dieu puisse s'en donner à coeur-joie avec nous, en prenant naissance [de la Vierge et du Père], et qu'il puisse exister un ordre de vérité - un ordre poétique - qui ne soit point celui de nos histoires et de nos calculs. Austère métier que de préparer, dans l'immense ennui que les hommes se causent réciproquement et qu'ils font de toute chose, la matière d'une aurore."
François Cassingena-Trévedy, Etincelles III, 2006-2009, Paris, Ad Solem, 2010.
Ces deux citations parlent aussi à mes yeux du métier d'enseignant, mon métier.
Donner le goût des fables et des contes, qu'ils soient féériques ou cruels, et faire toucher le poids des gestes, des mots et des images, décrire la vie aussi bien et dans le même temps comme révolte et remerciement, émerveillement et mélancolie.
Parvenir à le vouloir chaque jour...
20:26 Écrit par Nathan dans Abstractions | Commentaires (0) | Tags : citation, noir et blanc, rene char, abstrait, matiere, francois cassingena | |
15 juin 2010
La fleur de la nécessité
"Le miracle est la fleur inévitable de la nécessité."
Nikos Kazantzaki, Alexis Zorba
07:30 Écrit par Nathan dans Abstractions | Commentaires (0) | Tags : citation, noir et blanc, abstrait, matiere | |
12 juin 2010
La lucidité
"La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil."
Char, Feuillets d'Hypnos
Nils, 19 ans
06:00 Écrit par Nathan dans Portraits | Commentaires (0) | Tags : rene char, citation, noir et blanc, portrait | |
08 juin 2010
âmes de printemps, printemps des âmes
"Le propre des arts visuels n'est pas de gloser mais de travailler sur la puissance évocatrice des formes, de les porter à un tel niveau d'intensité, à un tel degré d'incandescence, qu'on perçoit soudain l'œuvre traversée par une impalpable présence, au-delà d'elle-même. Présence que l'on serait bien en peine d'expliquer, aussi spirituelle et aussi charnelle en son acmé que l'amour fou. En nous conduisant vers l'essentiel, vers ce meilleur de nous-mêmes par l'approche du cœur de l'Etre contre le consumérisme des dévots de l'Avoir, les œuvres d'art traversent notre époque tiède et blasée avec cette irréductible aura de mystère qui donne le frisson et l'espoir, qui soulève les belles colères ou éveille plaisir et passion."
Loin de moi la prétention d'illustrer un texte aussi exigeant! Atteindre à l'incandescence...
Alors plutôt, quelques papillons, âmes folâtres du printemps.
Azuré du trèfle (Everes argiades)
Gazé (Aporia crataegi) posé sur une nielle des blés
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Mélitée du mélampyre (Mellicta athalia)
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Azuré du trèfle (Everes argiades) sur une fleur de trèfle
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Azuré des nerpuns (Celastrina argiolus) sur une pimprenelle fanée
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Moiré des fétuques (Erebia meolans) sur un bouton d'or
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Cantharide fauve (Rhagonycha fulva) sur un épi d'orge
07 juin 2010
L'Espérance
« Je ne crois qu’à ce qui me coûte. Je n’ai rien fait de passable en ce monde qui ne m’ait d’abord paru inutile, inutile jusqu’au ridicule, inutile jusqu’au dégoût. Le démon de mon cœur s’appelle – A quoi bon ? »
Bernanos, Les Grands Cimetières sous la lune
Femme à l'enfant
14:45 Écrit par Nathan dans Abstractions | Commentaires (0) | Tags : bernanos, citation, macro, abstrait, matiere | |
31 mai 2010
La politique du regard
L'envol
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" [...] En dépit de cette assimilation si commune et si irréfléchie que l'on fait de lui avec la pure abstention, le regard est bel et bien la forme la plus élémentaire d'engagement. Oh! certes, celui qui regarde sait bien qu'il n'a pas compétence universelle (à d'autres toutes sortes d'actions et d'agitations au milieu des hommes, et des événements, et des choses), pas davantage qu'il ne revendique pour lui-même une once du pouvoir qui s'attache à bien des efficacités contemporaines, réelles ou plus souvent illusoires, une once de ce pouvoir mondain dont il semble parfois que la faculté de voir lui soit inversement proportionnelle, comme s'il avait acheté au prix de la cécité l'assurance de s'imposer et de parvenir à des fins sordides. Celui qui regarde sait pertinemment, en revanche, qu'il est de sa compétence de regarder, que rien n'est a priori extérieur à l'orbe que ses yeux ne cessent d'agrandir, qu'il n'est rien qui soit étranger au domaine seigneurial de son regard (l'exercice du regard étant évidemment la forme la plus débonnaire de royauté), qu'il n'est rien, en conséquence, qui ne le regarde pas. Comment, dès lors, et si éloigné qu'il soit, en apparence, de cette agitation des hommes et des choses que l'on appelle communément la "politique", la portée de son regard ne serait-elle pas (et, encore une fois, sans qu'il fasse rien exprès) d'essence politique, mais selon l'acception originelle du terme, qui est de haute naissance, comme on le sait?
[...] Celui qui regarde s'édifier la cité des hommes contribue bel et bien à son édification, à son entretien, à sa salubrité, à son avenir, cet avenir dût-il passer par un orage. Par son simple regard, par le service ordinaire de son seul regard, il est l'édile du monde entier. [...] Glaukôpis, c'est-à-dire "au regard brillant", Athéna est aussi Erganè, c'est-à-dire "artisane". Le regard est en somme la plus sage autant que la plus délicate des industries. Rien ne se construit ni ne s'assemble que quelqu'un ne soit là, dont l'unique exercice soit d'assister. Rien, à commencer par le monde lui-même, en son entier, puisqu'il ne vient à l'existence et à l'unité qu'à vue d'œil, que par la présence attentive et bienveillante de cette Sagesse sans commencement qui confesse ainsi son propre et unique travail. [...] Secrètement affiliés à cette Sagesse, elle-même filiale, les hommes de regard sont architectes: au milieu des machines, leur regard tout seul est levier, comme au milieu de la matière, tout seul, il est levain. En se posant sur le monde avec effort (mais un effort qui ne fait pas le moindre bruit), il pose quelque chose qui s'apparente à une première pierre: mieux encore, il est lui-même la première pierre sur laquelle d'autres édifieront. [...] De même que les portes et les fenêtres, loin de représenter des enjolivements inefficaces ou de simples superfluités, entrent de plein droit dans la structure de la maison et lui sont organiquement nécessaires, de même les êtres de regard - les "religieux" du regard - entrent dans la structure du monde et la définition de la société."
François Cassingena-Trévedy, moine de Ligugé,
Etincelles III, 2006-2009, Editions Ad Solem, 2010
Temple zen, Kyoto
(Vous pouvez retrouver d'autres photos de temples zen sur le blog ICI.)
22:04 Écrit par Nathan dans Abstractions | Commentaires (0) | Tags : francois cassingena, architecture, citation, japon, kyoto, macro, abstrait, matiere, temple zen | |